mot de la zone : Eurydice

partition

 

Ouverture en doubles croches ascendantes aux trompettes. Amour. Cet homme est à sa voix ce que cette femme aux fleurs sauvages. Mariage. Elle prend les choses par la racine et se dérobe. Sa quête à lui pour fléchir à l’aide d’instruments les forces contraires et la ramener en surface. Accord bancal dans les tréfonds. Ça dissone. Il échoue à lui parler sans la regarder. Mille fins imaginées. Dont deux par Monteverdi : le pouvoir de la beauté mesurée élève le héros en pleine lumière, où il la retrouve, elle, mais pas elle, en simulacre. Ou bien. Les prêtresses de la puissance folle le disséminent pour toujours en fleurs sauvages, en roches sauvages, en écume dans l’océan sauvage, en tempêtes vives dans les méandres sauvages des vents sauvages et l’opéra s’ouvre enfin sur le ciel et la terre— version qui n’a plus de partition pour être jouée ni chantée. Restent les mystères sur les murs silencieux de Pompéi.

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le sens du vent

 

Grand et gris. Grand, gris et rempli de formes géométriques toutes prises dans le même grain. Long cylindre horizontal, rectangles en séries, lignes droites, cercles et grilles. Grandes, grises et figées. Des machines. Ponts, goulets, silos sans mesure et tamis suspendus. Plainte de gorge saccadée. Un goéland raille, peut-être deux. Ils font résonner la halle encombrée. Par des portes irrégulières, le son se propage dans les ateliers derrière, les magasins, un appentis, des docks, des tuyaux, un entrepôt dans l’enchevêtrement de la structure sans affectation. Tout ce métal pris. La gangue de ce qui ne coulera plus. Un escalier monte le long de la palissade et court sous des poutres se souvenant dans l’ombre de la charpente de la couleur de leur rouille. Une coursive passe au dessus d’un bassin circulaire. Hélice et axe immobiles. Plateforme imbriquée de chevrons. Un tapis n’y défile plus. Tambour grillagé. Une rumeur sourde se fait l’écho du progrès achevé. Une porte à franchir. Ici. > Lire la suite

tout ça qui

 

Tout ça qui surgit et qui engloutit, tout ça qui prend au ventre, le bas-ventre avec le haut des cuisses, tout ça qui empoigne l’estomac, tout ça qui compresse la glotte, tout ça qui saisit aux chevilles, et cloue chacun au sommet de ses pommettes saillies. Tous ces coups qui ne portent pas, toutes ces voix qui ne sortent pas. Tout ça qu’Orphée lorsque le retour ne vient pas. Oui. Mais aujourd’hui. > Lire la suite

Eurydice et Orphée

 

L’histoire dit un serpent. Forme prise par la volonté d’Eurydice de descendre aux enfers. Insidieuse et mordante. Elle entre sous terre à la recherche de la source, de sa source. Plus de place sur terre pour elle : exclusivité d’Orphée. Orphée l’inspiré. Tout air est pour lui, l’air et le ciel et toute la surface de la terre, la lumière et les dieux d’en haut, les arbres, les oiseaux, le gel et la brise, les sources claires et vives, celles qui courent et ceux qui volent, la mer dans ses tempêtes et l’océan dans toute son étendue, le flanc des collines et le sommet des montagnes. Lumière, lumière, lumière. Eurydice. Forces obscures.

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