Joyeux
réjoui
assis là
de la brise qui tremble
Tout doux
expire l’avril
Chaque heure soupire d’amour chaque animal
L’aura que tremolando
Dolce spira l’aprile
Ogn’hor sospira d’amor ogn’animale
Joyeux
réjoui
assis là
de la brise qui tremble
Tout doux
expire l’avril
Chaque heure soupire d’amour chaque animal
Ici les voix s’étirent en lignes continues, soutenues par une pulsation presque secrète mais toujours présente — et le langage de la musique, tout en modulations et en émotion, surpasse celui des mots !
Pour faire entendre les larges courbes déployées par Fauré autour de l’inexprimable, À bout de souffle propose de se placer au plus proche des voix : un piano seulement pour accompagner les œuvres. Et les poèmes de Victor Hugo, Armand Silvestre, Paul Verlaine… seront lus avant d’être chantés. Ainsi prendra corps la polyphonie chère à Gabriel Fauré, premier romantique à découvrir le grain de la modernité, scintillant encore à notre oreille.
Belle et ressemblante, la musique qui joue à sembler la poésie, tant le rythme et la mélodie sont les éléments mêmes de la matière poétique.
Ravel, Debussy, Hindemith et Poulenc ont en commun d’avoir posé cette matière dans leur creuset : extraire la musique des mots, en pénétrer les secrets prosodiques et imaginaires, faire entendre le dialogue intense qu’ils ont entretenu avec les poèmes. Voilà les opérations d’alchimistes auxquelles ces compositeurs nous incitent à l’écoute de leurs chansons.
Musique ou poésie ? Poésie ou musique ? Déjà le madrigal jouait avec ces frontières lorsque Monteverdi découvrait Pétrarque. Pour faire goûter le plaisir de ce jeu baroque, l’ensemble À bout de souffle a choisi de faire dire les poèmes de Charles d’Orléans, Rilke, Apollinaire et Éluard, avant de les chanter. Ainsi l’auditeur sera à la place du compositeur : à la frontière entre poésie et musique, moderne et ancien, création et réception, avec tout le sérieux et l’humour propres au jeu.