Écrans

Ici des textes publiés aussi sur des réseaux sociaux, des sites amis, dans des livres pour iPad— la circulation comme expérience de maturation des textes.

LA PEAU DU LAC

 

ONE dans le vent, la peau du lac, la peau du lait qui frise. TWO dans le vent, la peau du lac, la peau du lait —oh mon vieux père frisant. THREE dans le vent, maman, j’appelle dans le lait, ça déborde le lac et mon vieux père qui brasse ses côtes en avant. FOUR dans la peau, le vent qui siffle maman et le lit qui passe à mon père aux yeux de lait sur le toit pissant. FIVE dans le ventre, j’ai le lait maman, j’ai le lac et le vent,  j’ai le vent qui frise en dedans. Et la peau du lac recouvre le temps.

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partir à 5 am

 

Go on à attraper le soleil 5 am j’enfourche le vélo jamais attaché et vers l’est vers l’est n’importe quelle route Claiborne ou Saint Claude suffit de trouver un pont qui à gauche encore à gauche et tout droit et là le pont pas levé ses poutres d’acier rythment les hangars et moi sweaty déjà sous la chemise où s’engouffre le vent léger qui ne suffit pas à rafraichir ni à balancer les arbres pas verts encore car lumière trop nuit mais le halo s’étend là-bas avant la chaleur sur tout le jour et tout ce monde qui se lève tôt en bagnole ils passent de quarter en quarter dans la pénombre des fenêtres allumées des façades pas roses pas bleues pas jaunes encore quand il y en a des maisons ce qu’il en reste des baraques > Lire la suite

Le Loup et l’Agneau

 

Le Loup, l’Agneau, la Planète, l’Homme et les négociations climatiques

La raison du plus fort est toujours la meilleure
Nous l’allons montrer tout à l’heure

On connait la fable : l’agneau s’abreuve, le loup cherche querelle, le faible se débat, et la bête cruelle finit tout, là. Simple comme de l’eau de roche, pure, onde pure. Méchant loup et gentil pauvre et petit agneau emporté au fond des bois. Sortez vos mouchoirs. Pleurez bambins, tremblez têtes blondes à la mèche ondulée. Ah que les loups sont méchants ! Ah que les agneaux sont gentils ! N’allez pas au bois d’Ormonde, non, n’allez pas au bois !

Là-bas s’y joue le combat toujours gagné de la Force contre la Loi. On vous aura prévenu. La raison du plus fort est toujours la meilleure. L’Agneau esquisse sa défense. Et cette belle logique ovine formulée par trois fois, mise à plat : – Plus de vingt pas au-dessous d’elle… et que par conséquent, en aucune façon… – Je tette encore ma mère. Et l’animal de bêler qu’il n’a pas de frère… L’Autre se fatigue de tant de galimatias… Sans autre forme de procès, Le Loup l’emporte, et puis le mange. Quelle tyrannie ! Quelle injustice ! Pauvre peuple de petits Agneaux mal défendus… fuyez le Loup ! fuyez le loup… ou domptez-le ! On ne peut plus laisser faire ! Non ! Armez la Loi etc. ! Là-dessus, René, Pascal et le siècle de Raison, et les Lumières, les lois fortes et coloniales, les zoos, les tribunaux internationaux… tout va bien ! À bas les loups ! Vivent les Agneaux !

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le sens du vent

 

Grand et gris. Grand, gris et rempli de formes géométriques toutes prises dans le même grain. Long cylindre horizontal, rectangles en séries, lignes droites, cercles et grilles. Grandes, grises et figées. Des machines. Ponts, goulets, silos sans mesure et tamis suspendus. Plainte de gorge saccadée. Un goéland raille, peut-être deux. Ils font résonner la halle encombrée. Par des portes irrégulières, le son se propage dans les ateliers derrière, les magasins, un appentis, des docks, des tuyaux, un entrepôt dans l’enchevêtrement de la structure sans affectation. Tout ce métal pris. La gangue de ce qui ne coulera plus. Un escalier monte le long de la palissade et court sous des poutres se souvenant dans l’ombre de la charpente de la couleur de leur rouille. Une coursive passe au dessus d’un bassin circulaire. Hélice et axe immobiles. Plateforme imbriquée de chevrons. Un tapis n’y défile plus. Tambour grillagé. Une rumeur sourde se fait l’écho du progrès achevé. Une porte à franchir. Ici. > Lire la suite

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