Sur le vif

Écriture poreuse celle qui commence comme un commentaire et come come come… la voilà toute envahie de l’imaginaire à l’oeuvre, de l’oeuvre commentée.

Soumission à Houellebecq

 

Dans Soumission, Michel Houellebecq fait du Houellebecq, à savoir qu’il s’interroge sur la misère sexuelle de l’homme occidental hétérosexuel, qui — il faut bien le reconnaitre— vit une première anthropologique depuis la fin du XXème siècle :

– choisir lui-même la compagne de ses ébats dans des espaces qui ne sont pas explicitement régulés à cet effet (comme l’étaient bordels, cabinets d’entremetteuses, salons familiaux, agences matrimoniales…), ce qui l’engage à subir les règles implicites d’un marché de la relation sexuelle, comme raconté dans les Particules élémentaires,

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Au royaume des icônes

 

Le joli par Mary Cassatt, le regard pour un Pierre-Narcisse Guérin, le rendu de la « gadoue lumineuse » chez Pierre-Auguste Renoir, la découverte de « la vraie fesse » grâce à Félix Vallotton… Déambuler page à page dans un musée à la collection éclectique, picorer sur la table les morceaux qu’on aime déjà, se laisser tenter par un tableau bizarre, laisser finalement faire le hasard.

S’en faire mettre plein la vue par Marc Molk est une activité joyeuse. Un ami vous parle de ce qu’il apprécie, de ce qui le touche et qui pourrait vous caresser, à vous aussi, la pupille. Et comme vous vous fréquentez depuis longtemps, il n’éprouve pas le besoin de vous faire savoir tout ce qu’il connaît. C’est bien. Vous connaissez sa posture un peu désinvolte et vous savez que c’est sa façon d’approcher ce qu’il aime pour ne pas alourdir le propos. Il peut même au détour de la conversation, vous faire part de ses pensées saugrenues, il sait que vous sourirez, au coin des lèvres et derrière les yeux, avec le fond de la gorge soudain détendu.

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La ville et la vague

 

Ola Paris, Fragilidad, Sophie Spandonis, 2012

Ola Paris, Fragilidad, Sophie Spandonis, 2012

 

Dans le polyptique inachevé Fragilidad (Todos somos japoneses) de Sophie Spandonis on voit de tableaux en tableaux la vague d’Hokusaï menaçant de plus ou moins près Miami, la Tour Eiffel, Rio de Janeiro, Buenos Aires… le travail n’étant pas terminé, on peut imaginer toute ville sur le point d’être engloutie, la Maison Blanche s’y prépare. Vague de face, de profil droit, de profil gauche, avec ses sinuosités en blanc et bleu, son redan et ses projections blanches par devant. Les villes ici représentées le sont par des cartes postales dont les lignes du paysage sont prolongées par le travail du pinceau qui les place, quoi que le lieu soit, dans une marine, vague oblige. On ne s’attendait pas à un resurgissement si fort de la plage sous les pavés parisiens. Mais l’évidence est là : le raz-de-marée menace aussi sur le champ de Mars, à plus ou moins grande distance selon les désirs ou les nécessités du moment. Photos colorisées des temps récents lors desquels on pouvait encore croire à l’idylle de territoires lointains. Témoignages des voyages réalisés en bons baisers et amitiés — pourrait-on lire au dos — envoyées de l’autre bout du monde, des différents ailleurs qui existaient encore.

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Effets de Pierre Ménard à Buenos Aires (témoignage)

 

Je sais qu’il est très facile de récuser ma pauvre autorité. J’espère pourtant qu’on ne m’interdira pas de citer deux hauts témoignages. La baronne de Bacourt (au cours des vendredis inoubliables de qui j’eus l’honneur de connaitre le regretté poète) a bien voulu approuver les lignes qui suivent. La comtesse de Bagnoregio, un des esprits les plus fins de la principauté de Monaco (et maintenant de Pittsburg, de Pennsylvanie, depuis son récent mariage avec le philanthrope international Simon Krautzch) si calomnié, hélas, par les victimes de ses manœuvres désintéressées, a sacrifié « à la véracité et à la mort » (ce sont ses propres termes) la réserve princière qui la caractérise, et, dans une lettre ouverte publiée par la revue Luxe, m’accorde également son approbation. Ces titres de noblesses, je pense, ne sont pas insuffisants.

J’ajoute à cela pourtant que depuis bien avant ma naissance et au plus proche d’elle aussi, et par quelque orbe qu’on la considère, on y trouvera les raisons qui font qu’aujourd’hui je mène l’enquête qui me préoccupe sous l’égide de la Croix du Sud (la constellation que l’on peut observer à l’orée du firmament depuis Buenos Aires, et encore, seulement à partir de 3h de la nuit, et non la revue littéraire qui fit connaitre l’inventeur de Pierre Ménard à la sphère parisienne au début du siècle précédent, encore que l’une n’empêche pas l’autre). L’allusion à mainte chèvre trouvera peut-être ici sa résolution, souhaitons que cette affaire s’achève en miel et lait d’Amalthée, comme elle a dû certainement commencer, ou en dulce de leche pour le moins.
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